Viscères maison

Ici, je mélange deux idées que je voulais commenter, l'une inspirée de la collection Gore et du small press américain spécialisé en horreur, l'autre inspirée d'un virulent billet sur l'auto-édition.

Les raisons du refus d'un manuscrit par une maison d'édition ne sont pas nécessairement un manque de qualité (très souvent c'est le cas, mais pas toujours). Chaque maison d'édition à le droit de choisir le risque associé aux livres qu'elle publie. C'est important pour leur survie financière et pour la cohérence de leur catalogue. Récemment, sur le blogue de l'Ermite, Édouard Bond avouait être l'un des auteurs les moins vendus chez Coup de tête. Pourtant, Maudits! a été cité comme l'un des meilleurs romans d'horreur québécois par plusieurs fans et auteurs visitant ce blogue, et je suis bien d'accord avec eux. Je n'aurais aucune hésitation à acheter les livres de Bond s'il décidait de les publier lui-même. Évidemment, c'est un auteur que j'aime bien, pas un petit nouveau.

En général, ce qui manque aux romans autopubliés est un cerbère. Quelqu'un qui dit: "Ton roman est assez bon/n'est pas assez bon pour être publié." Point. Sans aucune notion de marketing, de ressources financières, de coût d'option. Un auteur qui a cette ressource à portée de main pourrait réussir en auto-édition s'il s'assure ensuite une bonne direction littéraire, une bonne révision linguistique, un bon graphisme et une bonne distribution. De plus en plus, la distribution ne sera plus un problème, puisque de plus en plus de lecteurs ont les gadgets et l'intérêt pour lire en format électronique. Le texte a encore besoin d'être excellent, voir parfait, mais ça demande moins de graphisme (format epub) et de logistique. Pas besoin d'acheter des centaines de livres qui ne se vendront peut-être pas. Un auteur avec une bonne visibilité sur le web pourra surement intéresser des gens à son livre. Par contre, il devra sans doute faire face à une certaine discrimination. Et il y a le danger d'inonder le marché d'oeuvres de piètre qualité...

Maintenant, appliquons tout ça au genre qui m'intéresse, c'est-à-dire la romance, celle des coulisses de viscères éclaboussant les murs et des taches de sang sur le plancher, cette littérature qui courtise l'indicible dont certain d'entre nous sont épris. Je parle d'horreur, évidemment.

Au Québec, combien d'éditeurs publient de l'horreur? Plusieurs! C'est quand même surprenant de voir combien de maisons d'édition québécoises publient, par-ci par-là, des textes à vocation terrifiante ou fantastique, même si aucune d'entre elles n'est dédiée exclusivement à ce genre.

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Imaginons maintenant qu'un auteur fictif a écrit un tout aussi fictif roman intitulé Viscères maison, un heureux de mélange d'horreur extrême et de fornication contre nature, avec des personnages sublimement caractérisés et une prose fascinante. Après un bon travail de réécriture et la relecture par des gens qui connaissent la littérature, l'auteur soumet (enfin!) son manuscrit à des éditeurs. Connaissant bien le marché, l'auteur a ciblé les maisons d'édition les plus susceptibles de le publier, incluant celles, petites ou grosses, donnant dans les genres. Pourtant, il ne reçoit que des refus.

Quelque temps plus tard, il a l'occasion de discuter avec quelques un de ces éditeurs. Certains ne veulent pas publier parce que c'est trop violent et trop graphique. D'autres n'ont pas de place dans leur calendrier de publication. D'autres trouvent que le risque est trop grand. Voyez-vous, son texte s'adresse à un public spécialisé. Même si Sénécal a montré que ce genre peut vendre, ce n'est pas certain que ce nouvel auteur séduira autant le public. Pour chaque Stephen King, pour chaque Dean Koontz, pour chaque Clive Barker, combien y a-t-il d'excellents auteurs d'horreur qui restent underground? Pour compliquer le tout, au Québec, il n'y a aucune maison d'édition spécialisée en horreur. Au Québec, en 2010, pas de collection GORE.

Que devrait faire cet auteur?

Les plus sages d'entre nous répondront qu'il devrait attendre, retravailler un peu son texte, le soumettre plus tard, attendre les opportunités. Entre temps, il pourrait écrire un autre roman, le travailler, le soumettre. Mais si ça ne marchait toujours pas, cette fois encore pour des raisons qui n'ont pas vraiment à voir avec la qualité littéraire?

Je crois que cet auteur pourrait tenter sa chance en publiant lui-même son roman.

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14 commentaires:

  1. Mon billet a réussi son objectif: débattre au sujet de l'auto-édition. Tu amènes sur ton blogue un point crucial: une bonne direction littéraire. Je ne bâillonne pas l'auto-édition, bien au contraire, je trouve ça courageux. J'amène seulement les gens à se méfier de la méthode. Avec les maisons d'éditions à compte d'auteur, il y a de forts risques.

    Mon billet s'adresse surtout aux jeunes auteurs qui ne voient que cette option pour percer le milieu littéraire sans tenter de le comprendre. Si on utilise de la bonne façon l'auto-édition, ça peut-être gagnant. Mais dans le doute, on devrait plutôt y aller du côté de l'édition traditionnelle.

    Je suis certain qu'à travers mon article VIRULENT tu avais compris les subtilités...

    Sans rancune :P

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  2. @Keven Évidemment pas de rancune! Le but c'est de discuter pour qu'ensemble on comprenne mieux les enjeux.

    J'ajouterais à mon billet que je ne ferait pas une première autopublication avec n'importe quel roman (même s'il est bon). En fait, je ne serais enclin à le faire qu'avec un roman très spécialisé qui toucherait un public restreint (par exemple de l'horreur érotique très gore) et pour lequel la publication serait plus difficile, vu la quantité très limitée de maisons d'éditions intéressées à publier ce sous-genre.

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  3. @Fred : Quand j'ai commencé à écrire, je m'étais dit que si rendue à 30 ans je n'avais rien publié, je m'auto-éditerais (probablement via Lulu ou un autre imprimeur à la demande). Pas en pensant que ça me permettrais de percer, mais juste parce que je m'étais dit que je voulais, une fois dans ma vie, tenir un livre avec mon nom dessus.

    Alors je comprends tout à fait ta position : quand on sait qu'on a mis tout ce qu'on pouvait dans un roman et qu'on refuse de le publier parce qu'on craint qu'il dérange trop, l'auto-édition ça peut être une façon de faire vivre une oeuvre en laquelle on croit.

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  4. @Gen Heureusement, je n'en suis pas là. De toute façon, je préfère mettre mon temps sur l'écriture plutôt que sur tout le travail qui serait nécessaires à l'autoédition.

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  5. Le succès est possible, on n'a qu'à penser à
    Max Barry et à David Moody.

    Barry a décidé d'offrir en ligne un chapitre par semaine de son Machine Man. Résultat? Son livre a attiré l'attention de nul autre que Darren Aronofsky qui a décidé d'en faire son prochain film.

    Quant à David Moody, il a connu beaucoup de succès avec son livre Autumn, distribué sur Internet.

    "Autumn became an on-line phenomenon, racking up more than half a million downloads and spawning a series of sequels. In 2005 Moody formed ‘Infected Books’ – his own publishing house through which he independently published his books. ‘I hate the term “self-published”… it conjures up images of crap books which really shouldn’t be published. The reality is that lots of authors who could get their books ‘traditionally’ published, choose to retain control and publish their books themselves. The availability of Print on Demand technology and the increasing popularity of eBooks makes it possible for any writer to get their work onto the shelves of bookstores and online retailers on their own.’"


    Évidemment, il y a beaucoup plus d'opportunités pour un auteur de genre anglo-saxon que pour un auteur de genre québécois.

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  6. @NicH: Excellents exemples. On pourrait aussi mentionner JA Konrath, qui semble faire un profit extrêmement élevé avec ses romans électroniques... Mais le marché anglophone est plus grand que le notre. Cependant, dans le marché anglophone, il y a aussi plus de bruit.

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  7. Je connais pas JA Konrath. Mais je viens de voir sur Amazon que certains de ses livres "Kindle Edition" se vendent à un prix aussi bas que 2,99$ C'est certain qu'à ce prix-là, c'est plus facile pour un lecteur "d'essayer" un nouvel auteur.

    P.-S. : c'est hors sujet, mais le zine Borderline cherche présentement des textes fantastiques et horreur pour leur prochain numéro. La réponse est rapide : je leur ai envoyé un texte et j'ai eu la réponse (positive) dans la même journée.

    Si jamais tu as un truc à leur proposer, tu peux le faire ici :
    http://legendsleoben.free.fr/index.php?option=com_content&view=article&id=6&
    Itemid=3

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  8. @Fred: tu veux qu'on se parte une maison d'édition spécialisé en "gore"/"horreur"/"bizarro"/"culte"? Moi j'suis partant quand tu veux car ces littératures m'intéresse mais ne trouvent malheureusement pas leur place parmis les "grandes maisons d'éditions" et c'est dommage. Je crois que le peuple Québécois à trop peur d'avouer qu'il aime sortir de la marge et rouler à 250 KM/H dans la garnottes, le soir, sans lumières... :P

    M'enfin, c'est mon opinion et si tu viens au prochain Boréal à Montréal, on en rediscutera plus en profondeur avec une bonne bière à la main!

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  9. @Alamo Proposition intéressante qui mérite d'être discutée. Mais j'évalue encore mal le travail nécessaire. On pourra s'en reparler, idéalement autour d'une bière!

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  10. @Fred et Alamo : Vous devriez jaser avec Ed aussi je pense...

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  11. Je n'ai malheureusement pas encore eu la chance de rencontrer ce fameux Édouard Bond, mais on a comparé mon écriture à la sienne et cela m'a intrigué. :)

    Pour Gen... bien on a discuté en privé de quelques affaires, mais on peut pas t'en parler, faudrait couper quelques part et je crois que tu apprécies d'avoir tes membres en entiers, donc...motus et bouche cousus! :P

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  12. @Gen et Alamo: Moi non plus je n'ai pas encore eu la chance de rencontrer Ed. J'espèrais le recontrer au dernier salon du livre de Québec, mais le destin nous a refusé ce privilège.

    J'ai très hâte d'avoir plus de détails sur son projet d'édition en tout cas.

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  13. @Alamo : Couper quelque part? Toi pis qui? :p

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  14. Moi, Fred et ma machete rouillée! ;)

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