The thief of broken toys, de Tim Lebbon

Dans cette novella fantastique, Tim Lebbon parle de la perte d'un enfant et de la solitude qui vient avec. Il parle du processus de deuil et l'importance de nos souvenirs, aussi douloureux soient-ils. Ça fait longtemps que je n'ai pas lu une histoire aussi triste. Peut-être que ça m'a touché autant parce que je suis papa et que la seule idée de perdre ma fille est assez pour me remplir de désespoir, mais je crois que ça va plus loin que ça. Lebbon dresse un portrait émouvant d'un homme et de son deuil avec, à l'appui, une multitude de souvenirs qui pourraient être banals, mais qui, au fond, représentent l'essence du bonheur d'avoir un enfant. Les jouets brisés sont le symbole de ces moments et des séquelles qu'ils laissent quand il n'y a plus d'enfant à qui tenir la promesse de les réparer.

Le village côtier de Skentipple agit comme un décor vivant dans lequel évolue Ray, le personnage principal, celui qui a perdu son enfant, Toby, et, pour d'autres raisons, sa femme Elisabeth. Chaque chapitre débute avec un portrait de la ville, de son histoire, de ses habitants, d'Elisabeth.

Chaque chapitre débute aussi à la deuxième personne. Cette particularité stylistique est exceptionnelle au sens où Lebbon réussi à faire fonctionner une approche qui aurait probablement échoué dans les mains d'un auteur moins doué. Ainsi, dans le premier chapitre, il assimile le lecteur au personnage principal, lui attribuant son deuil, sa solitude, sa tristesse sourde de voir son ancienne conjointe dans les bras d'un autre homme. Puis, Lebbon fait lentement la transition entre la deuxième et la troisième personne. Il le fait avec tant de doigté qu'on conserve les émotions tout en les transférant au personnage. Le tout sans même qu'on s'en rende compte. C'est un effet unique que je n'ai encore vu ailleurs, surtout qu'il est rare que la deuxième personne soit efficace dans une oeuvre de fiction.

The thief of broken toys est une novella prenante qui m'a marqué, me ramenant par le fait même à l'essence du bonheur de la vie de tous les jours. Malgré une conclusion un peu moins forte que le reste de l'histoire, je n'oublierai pas ces jouets brisés.

The thief of broken toys peut être acheté sur papier un peu partout sur commande, ou en format électronique sur Horror Mall.

Écrire la science

Construire un article scientifique, c'est comme concevoir une histoire.

Dans un monde idéal, on part d'une question à laquelle on veut répondre et on établit la liste des expériences à faire pour répondre à cette question. Ça nous donne quelque chose qui s'apparente à une série de scènes. Ensuite on met les scènes en ordre pour raconter une histoire claire et intéressante afin que les lecteurs comprennent bien notre recherche. Reste qu'à écrire!

Très simple! Pourtant, ce l'est rarement autant. Ce que je viens de décrire, c'est plutôt l'étape finale, quand tout le travail de laboratoire a été fait. C'est un peu comme une deuxième version de la recherche. Ça s'apparente beaucoup plus à la révision qu'à la création d'une première version.

Quand j'écris une première version d'un texte littéraire, j'ai habituellement un plan général de ce qui va se passer, mais je laisse les détails de l'intrigue et l'ordre des événements apparaitre au fil de la rédaction. Quand on fait de la recherche scientifique, c'est un peu la même chose. On a souvent une bonne idée des expériences à réaliser pour répondre à une question, mais, au fil d'un projet, on réévalue les expériences nécessaires. On ne les fait pas toujours dans le bon ordre non plus. On en fait plusieurs pour rien. Sans compter celles qui ne marchent pas comme prévu ou qui ne marchent pas du tout. C'est comme la première version d'une histoire, qui contient des scènes inutiles, des personnages bâclés et des revirements qui ne tiennent pas la route. Alors, on fait de nouvelles expériences, on retourne en arrière dans nos hypothèses, on reformule notre question. Avec toutes ces données expérimentales en main, on a l'équivalent de la première version d'un roman.

Et qu'est-ce qu'on fait avec la première version d'un roman? On la réécrit, nom d'un chien!

Plus d'horreur... SVP

En mettant à jour ma liste des romans d'horreur québécois, j'ai retrouvé la sensation qu'elle était incomplète. Je vous invite, chers lecteurs et chères lectrices avides d'épouvante, à suggérer dans les commentaires de ce billet des livres et des auteurs d'horreur québécois qui ont été oubliés.

L'ombre de la bête, de Pierre-Luc Lafrance

L'ombre de la bête est une histoire de loup-garou en petit format, publié dans la Série Obzcure chez les Z'Ailées. L'intrigue se déroule à l'époque de l'inquisition, où un vieil homme raconte à son apprenti comment il a résolu une malédiction alors qu'il enquêtait sur le surnaturel. Une lecture rapide et divertissante avec de nombreuses surprises. Le style de Lafrance reste sobre, plaçant l'histoire au premier plan, ce qui favorise l'immersion. J'ai beaucoup aimé cette heure passée dans l'ombre de la bête. Je vous en recommande vivement la lecture.

Nouvelle espèce, version française de Splice

Un couple de scientifiques mélangent le génome d'espèces animales pour créer des bioréacteurs vivants. Financés par une grande compagnie de biotech, ils sont obligés de mettre leurs projets sur la glace afin d'isoler de leurs créations les protéines ayant le plus gros potentiel commercial. De leur côté, ils voulaient plutôt passer à l'étape suivante : ajouter de l'humain au mélange. Évidemment, comme la plupart des scientifiques fictifs, ils laissent de côté toute notion d'éthique et créent, en cachette, une créature hybride qu'ils nomment Dren.

Nouvelle espèce, version française de Splice, n'est ni un film d'action, ni un film gore, mais plutôt à un film psychologique plutôt lent qui explore la relation entre le couple de scientifiques et la créature. La naissance de Dren soulève des enjeux éthiques, familiaux et amoureux qui sont plus suggérés que discuté en détail. Ainsi, le film ne répond pas à ces questions pour nous et nous laisse dans le doute sur de nombreux aspects, laissant un certain mystère aux personnages. L'évolution de ces derniers tout au long du film est intéressante et suit de près le développement de la créature. L'intrigue est assez prévisible, chaque revirement étant présagé par des événements antérieurs. Cependant, ça ne m'a pas dérangé.

Le visuel du film est fantastique, surtout lorsque Dren atteint son stade le plus évolué. Les décors aussi sont assez intéressants, en particulier l'appartement des scientifiques, qui est peuplé de figurines et autres articles geek que l'on retrouve chez de nombreux jeunes scientifiques que je connais. De même, le laboratoire est assez réaliste; petit cloaque où les gens s'entassent pour travailler. Je n'en dirai pas autant des méthodes qu'ils utilisent pour créer leurs hybrides, qui m'ont semblé peu réalistes. L'insémination d'un ovule fait par une machine (plutôt que par micromanipulation), les systèmes informatisés de recombinaison d'ADN qui font tout automatiquement avec une superbe infographie (quand on crée des logiciels, c'est très rare qu'on ajoute de l'infographie pour "faire beau"), l'ordinateur qui informe instantanément si l'expérience de recombinaison à fonctionné, isoler une protéine en une nuit; tous des éléments qui ont déragé le scientifique en moi. La mention de certaines enzymes ("Quelle ligase as-tu utilisée?") était justifiée par rapport aux protocoles suggérés, mais elle détonait avec la haute technologie utilisée dans leur laboratoire. À ce propos, c'est étrange que leur équipe ne soit pas plus multidisciplinaire que ça, vu la nature technologique de leurs travaux.

Pour ce qui est de la qualité de divertissement, ça dépendra de vous. Sur quatre personnes présentes, deux n'ont pas vraiment aimé (ce n'était pas à ça qu'ils s'attendaient et ils ont été dérangés par les aspects scientifiques pas trop réalistes), une a trouvé ça pas pire, mais sans plus, et moi j'ai bien aimé malgré quelques défauts. Nouvelle espèce me semble être une sorte d'hybride entre un série B et un drame psychologique, ce qui peut laisser certains spectateurs confus. Ainsi, sans vous recommander de voir ce film en salle, la location du DVD pourrait être une option intéressante. Au minimum, la bande-annonce est excellente.



En passant, merci à Sinistre Blogzine pour les billets.

Le pitch d'ascenseur

Il y a quelques semaines, j'ai eu la chance de participer à un souper de l'axe des Instituts des maladies infectieuses et immunitaires des Instituts de recherche en santé du Canada. À part un de mes collègues, les autres personnes assises autour de la table étaient des chercheurs que je ne connaissais pas. L'un de nos convives, un bioéthicien enthousiaste, a passé une partie du repas à discuter avec mon collègue et moi de l'importance de savoir décrire notre recherche de façon brève et accrocheuse. Voici la mise en situation qu'il nous a servie :
Vous êtes dans un ascenseur avec Bill Gates. Sa fondation a beaucoup d'argent à distribuer. Vous avec trente secondes pour le convaincre de financer votre projet.
C'est ce qu'ils appellent le elevator pitch. À brule pour point comme ça, ce n'est pas facile du tout, mais c'est diablement utile. Que ce soit en science, pour accrocher un visiteur lors d'une présentation par affiche ou pour décrire votre recherche à la famille ou des amis. Ou en littérature, lorsque vous rencontrez un éditeur à un moment impromptu, ou si vous voulez vendre votre livre à un lecteur potentiel. Avoir un elevator pitch tout prêt pourrait vous sauver la vie! De même, l'ajout d'un pitch dans une lettre de présentation lors de la soumission d'un manuscrit pourrait être très utile pour inciter l'éditeur à jeter un coup d'oeil au manuscrit.

J'ajouterais à ça les conseils de la rédactrice Caroline Vézina, chargée du cours de vulgarisation scientifique à l'Université Laval, qui propose d'y inclure le POQQQC. En d'autres mots, le pitch devrait répondre aux questions Pourquoi? Où? Quoi? Qui? Quand? Comment? Évidemment, si un de ces éléments est vraiment plate, on peut le laisser de côté, mais j'en connais qui diraient que ces éléments sont tous très importants. Essayez de répondre à ces cinq questions à propos d'une de vos histoires (ou un de vos projets de recherche), vous verrez que c'est très utile.

Pour ceux qui veulent s'exercer sans révéler toutes leurs intrigues secrètes, cet exercice pourrait être tenté dans le cadre du Défi 30-30, qui propose déjà des dizaines de résumés qui n'attendent qu'à être transformés en une, deux ou trois phrases punchées!

Mon lecteur de livres électroniques

La semaine dernière, j'ai acheté un Sony Reader Touch. Son prix ayant baissé presque de moitié, ça ne me faisait pas trop mal d'investir dans ce bidule. Même si c'est un modèle qui date de plus d'un an, je l'ai choisi parce qu'il correspondait à mes besoins de lecteur :
  1. Lire des oeuvres exclusives au format numérique ou difficiles à trouver en format papier.
  2. Obtenir immédiatement les livres que je ne pourrais obtenir qu'en commande spéciale.
  3. Économiser sur l'achat de certains livres.
Et d'écriveur :
  1. Relire mes textes (scientifiques ou horrifiques) ailleurs que devant mon ordi sans les imprimer.
  2. Annoter mes textes pour correction ultérieure.
Après une semaine, j'aime bien cet appareil. L'utilisation est conviviale. Le transfert des fichiers est facile (même si on doit passer par un logiciel plutôt que faire du drag and drop, ce qui est habituellement ma méthode de choix). Il lit directement les fichiers DOC sans avoir à faire de conversion, l'idéal pour relire mes textes. L'affichage des styles utilisés dans les fichiers Word est fidèle, ce qui m'a beaucoup impressionné. L'annotation se fait très bien avec le stylet. On peu aussi entrer du texte à l'aide d'un clavier apparaissant sur l'écran tactile, ce qui se fait bien, même avec les doigts seulement, lorsque l'appareil est en mode paysage.

Quand même, l'appareil n'est pas parfait. La fonction d'annotation est très bien pour des commentaires mineurs, mais pour ce qu'on pourrait appeler "une grosse job", c'est préférable de le faire sur papier ou directement sur l'ordi. Certains fichiers apparaissent plus ou moins bien à l'écran, en particulier le format PDF, qui demande une bonne connaissance de l'appareil pour arriver à obtenir un affichage adéquat et lisible. L'utilisation de la ponctuation sur le clavier tactile est fastidieuse. Du point de vue technique, la quantité d’espace disque disponible reste faible, à 256 Mo. Ainsi, le Sony Reader Touch a quelques défauts, mais rien de majeur.

Pour ce qui est de la lecture en utilisant l'appareil, c'est très agréable. Jusqu'ici, j'ai surtout lu des fichiers DOC, dont un qui était un simple copier-coller d'une histoire postée sur un blogue. J'ai fait quelques tests avec des livres électroniques que j'avais déjà. Les Nova des Six Brumes sortent vraiment bien vu leur format. En fait, je pense que tous les ebooks en PDF devraient avoir ce type de mise en page, même si ce sont des livres de plusieurs centaines de pages. J'avais d'autres romans en format PDF et ils ne sortent pas tous bien. Souvent, c'est surtout parce que le texte est trop petit et que la mise en page se déforme lorsqu'on zoome. C'est aussi le cas des articles scientifiques, qui sont très beaux avant le zoom, mais illisibles à cause du texte trop petit. Le visionnement des fichiers en mode paysage améliore un peu la lecture. Cependant, ça dépend des documents. Par exemple, le manuel de jeu de rôles World of Darkness sort très bien sur l'appareil en mode paysage, même si le texte reste petit.

Jusqu'à aujourd'hui, je suis satisfait de mon achat. C'est satisfaisant de relire ses textes dans l'autobus sans les faire imprimer. De même, j'ai pu amorcer la lecture de livres électroniques que j'ai accumulés au fil du temps. Le seul problème que je vois avec cet appareil, c'est qu'il allonge de beaucoup la liste de romans que j'ai à lire!