Retour sur Boréal ; Tabous et valeurs morales dans la fiction

Le premier tabou mentionné par les panelistes : ne pas parler de soi ou de gens que l'on connait dans notre oeuvre. J'avoue que se garder une distance avec les événements de son texte est toujours une bonne idée, surtout lorsque ça inclut des meurtres, de l'horreur et d'autres atrocités, aussi sympathiques soient-elles. D'un autre côté, est-ce vraiment possible de ne pas inclure, ne serait-ce qu'inconsciemment, une partie de soi dans nos histoires ?

Les moments les plus fascinants de cette table ronde sont sans doute les souvenirs de Serena Gentilhomme, qui racontait comment on a censuré ses lectures et ses écrits alors qu'elle n'était qu'une enfant ou comment de vielles dames bien pensantes avaient critiqué son roman en l'accusant presque de crimes contre l'humanité. Particulièrement savoureux !

À part ça, la principale conclusion est que tout sujet peut être traité en autant que ce soit fait avec doigté. Par contre deux sujets très sensibles ont été abordés : les crimes contre les enfants et l'apologie du suicide. Cela dit, je ne peux m'empêcher de penser à Le vide, de Patrick Sénécal. On a déjà eu une discussion à propos de ce roman sur La plume et le poing. On avait surtout discuté de LA scène clé du roman, celle où l'univers du personnage principal bascule alors qu'il est témoin d'atrocités. J'avoue que cette scène est dégueulasse, mais ce n'est pas ce qui m'a terrifié dans ce roman. Ce qui m'a choqué, c'est la suggestion que, quand rien ne va dans notre vie, quand rien ne nous intéresse plus, c'est une excellente idée que de commettre l'acte le plus haineux qui hante nos secrets innavouables afin de "flamber" un instant pour ensuite s'enfuir en grande, une corde autour du cou ou une balle dans la tête. L'idée en soit fait frémir, et c'est là que réside l'horreur de ce roman, dans la certitude que l'on ignore les rêves viciés de notre famille, de nos amis, de nos voisins... Et si quelqu'un près de moi ressentait Le Vide, et s'il s'en inspirait...

2 commentaires:

  1. Pourtant je suis persuadé qu'il y a des gens qui ressente ce "Vide" mais qu'ils n'ont pas de flambeau À brûler..faute d'avoir un gourou..mais pensons À Dawson et autre du même acabit, ils sont là prêt À commettre l'irréparable..Et ce sont des gens bien ordinaire ..comme Maxime Lavoie (Le Vide).
    Et j'ose croire qu'une scène comme LA scène en Gaspésie n'est que pur fiction !!! Si on souhaite une certitude c'est bien celle lÀ!

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  2. Sans reprendre la discussion qu'on a déjà eu (c'est super gentil de mettre le lien d'ailleurs Frédéric :), je crois que la scène gaspésienne n'est pas ce qui se fait de pire en fait d'horreur (et Pierre, la règle de psychologie dit que si quelqu'un peut l'imaginer, un malade, quelque part, l'a sans doute déjà fait).

    Effectivement, ce qui est le plus horrifiant dans le roman, c'est d'imaginer ce qui arriverait si tous les gens qui n'ont plus rien à perdre décidaient de se livrer à un dernier acte de violence...

    Dawson est un bon exemple de ce que ça pourrait donner... Heureusement, la plupart des gens, même désespérés, n'auront jamais la force de commettre de pareilles violences (et d'ailleurs, je crois que sans la présence de ses armes à feu, Gill n'aurait pas été capable de tuer lui non plus).

    Je tire cette certitude (relativement) rassurante de mes années d'arts martiaux : même les gars les plus agressifs ont du mal à frapper leur adversaire les premiers temps. Blesser son prochain n'est pas un réflexe naturel. Il faut être insensible ou très entraîné pour y arriver (et même avec l'entraînement, la première chose qu'on demande après un combat c'est : "t'es-tu correct? veux-tu de la glace?")

    Évidemment, un gourou suffisammen charismatique pourrait changer les choses (pensons à Charles Manson)

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